Ce menhir se trouve sur "Le Site Mégalithique" dans la commune de Locmariaquer (56740) dans le Morbihan.
Aujourd'hui couché et brisé en quatre énormes morceaux, ce menhir qui mesure près de 21m pour une masse estimée à 280 tonnes est le plus grand connu en Europe. Lorsqu'il était dressé il devait
s'élever à plus de 18,5m au dessus du sol. Par comparaison, le Menhir de Kerloas à Plouarzel dans le Finistère est le plus grand menhir encore debout à l'heure actuelle avec ses 9,50m de
hauteur.
Le Grand Menhir, ou Men Er Grah, est taillé dans un orthogneiss ( type de roche granitoïde à gros grain et nettement feuilletée) étranger à la presqu'île de Locmariaquer dont le sol est
constitué, comme à Carnac, d'un granit à grain fin. Il pourrait provenir d'un affleurement situé de l'autre côté du Golfe du Morbihan, et aurait donc été transporté sur plus d'une dizaine de
kilomètres par des moyens encore indéterminés.
Au début du Néolithique 5000 ans avant notre ère, la mer se trouvait à plusieurs mètres en dessous de son niveau,
le rivage était situé environ 300m plus loin que les côtes actuelles, et le golfe du Morbihan était constitué d'une série de collines entrecoupées de vallées, et traversées par les rivières
d'Auray et de Vannes. Ces rivières permettant malgré tout d'accéder à l'arrière pays par voie d'eau, il est envisageable que le transport des blocs d'orthogneiss ait pu se faire partiellement par
flottage à l'aide de radeaux.
Pour le dresser, les habitants du néolithique ont probablement creusé une fosse dans laquelle ils faisaient basculer le menhir depuis une rampe construite en terre, avant de le redresser avec des
leviers et des chèvres en bois, et de le caler avec des pierres et de la terre. Une fois dressé il a été entièrement poli
avec des percuteurs de quartz. La base destinée à être enfouie est restée brute à l'exception d'une "rotule" d'extrémité dont le but était de faciliter sa mise en place.
Les cassures séparant les fragments des trois morceaux aujourd'hui alignés comportent de larges esquilles sans doute dues à une brutale chute en porte-à-faux. La cassure principale est en
revanche très franche et la disposition des blocs suggère qu'en s'écroulant, la partie supérieure a pu faire "chasser" la base qui se serait ensuite affaissée.
Le Grand Menhir, plus ancien que le Tumulus d'Er Grah et que la Table des Marchand, faisait partie d'un
alignement de 19 menhirs dont les fosses de calage ont été redécouvertes lors de récentes fouilles archéologiques. L' alignement s'étendait sur une longueur de 55m dans un axe nord-est /
sud-ouest depuis la Table des Marchand jusqu'au Grand Menhir, apparemment par ordre de tailles croissantes.
Au fil des siècles, de nombreuses théories ont été avancées cherchant à expliquer la chute du Men Er Grah, par des causes naturelles ( tremblement de terre, foudre) ou humaines ( des
Chrétiens destructeurs d'idoles païennes, des vandales Gallo-Romains, etc.). On pense aujourd'hui que le menhir aurait été brisé dès l'époque néolithique, quelques siècles après son érection,
sans doute entre -4300 et -4000. Un changement dans les croyances et les pratiques cultuelles, peut être suite à une guerre ou à l'arrivée de nouvelles populations sur le site de Locmariaquer,
aurait amené les habitants de la région à détruire les idoles des anciennes religions et à réemployer les pierres pour construire de nouveaux monuments.
Lors des fouilles du cairn de l'île de Gavrinis, les archéologues ont découvert que sa dalle de couverture complétait
parfaitement celle de la Table des Marchand, aussi bien par leur cassure que par les figures de bovins représentées
dessus. Les deux dalles seraient semble-t-il des fragments d'un même menhir haut d'environ 14m et ayant appartenu à l'alignement d'Er Grah. La dalle de chevet de la Table des Marchand,
connue pour ses somptueuses décorations, aurait pu elle aussi appartenir à ce même alignement; des analyses géologiques ayant démontré qu'elle avait été exposée en extérieur durant plusieurs
siècles avant d'être incorporée à la chambre du dolmen.
Sur la commune de Locmariaquer, plusieurs dolmens semblent avoir été construits avec des fragments de menhirs provenant de
l'ancien alignement, tels que le Mané Rutual et son impressionnante table de couverture longue de 11m, ou le Mané Lud dont le sol de la chambre est formé d'une énorme dalle en
forme d'écusson. Toutes les pierres que nous venons de citer sont taillées dans le même type de granit que le Grand Menhir.

Gravure sur le Men Er Grah - Photo CNRS / P. Glotain
Comme le montre la photo ci-dessus, le Grand Menhir Brisé, à l'instar des tables de couverture Gavrinis / Marchand, porte lui aussi un grand signe en relief,
malheureusement très érodé par les intempéries et les glissades de touristes peu respectueux. Cette gravure obtenue par piquetage de la roche représenterait un symbole de "hache emmanchée" assez
proche de celui que l'on retrouve à la Table des Marchand ou encore au Cairn de Kercado à Carnac.
Dimensions: environ 21m de long et 3m de large pour un poids approximatif de 280 tonnes. Il devait atteindre 18,5m au dessus du sol lorsqu'il était dressé.
Datation: érigé vers -4700 / -4500 avant notre ère, il aurait apparemment été abattu entre -4300 et -4000.
Autres noms: Men Er Grah ou Men Er Groah ( Pierre de la Sorcière), Men ar Hroëc'h ( Pierre de la Fée)
Classé MH: 1889
Localisation: à l'entrée de la commune de Locmariaquer suivre les panneaux "Site Mégalithique", rue de Kerlogonan. Entrée payante (renseignement:
02.97.57.37.59).
A proximité: Sur le même site se trouvent le cairn de La Table des
Marchand et le Tumulus d'Er Grah.
Bibliographie:
. Jean L'Helgouac'h, Locmariaquer; éditions Jean-Paul Gisserot
. Charles-Tanguy Leroux et Yvon Boëlle, Carnac, Locmariaquer et Gavrinis; éditions Ouest-France